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Oct 11

Des énergies pas très renouvelables ! (partie 3/3)



Un hold-up, une usurpation d’identité! C’est ainsi que l’on pourrait qualifier certaines énergies qui se font passer pour renouvelables. Pompes à chaleur, incinération de déchets ménagers, surgénérateurs nucléaires… Démasquons ces énergies abusives !

 

1. Les déchets ménagers : une fausse énergie renouvelable

 

incinrateur-dechets-menagers

 

On entend souvent que l’énergie produite par l’incinération des déchets ménagers est renouvelable. Cette qualification est très discutable !

 

En effet, qu’est ce qui est brûlé dans nos poubelles ?

  • Les papiers et les cartons ? Normalement, ils partent au recyclage et ne sont pas incinérés
  • Certainement pas les métaux, verres (enfin ceux qui ne sont pas recyclables).
  • Les déchets organiques (épluchures, noyaux, trognons…) : normalement, ils doivent partir au compost. Mais on peut qualifier leur combustion de biomasse donc renouvelable.
  • Les emballages plastiques : Ils brûlent bien effectivement, mais ce sont des dérivés du pétrole.

Bref, l’incinération des déchets ménagers n’a (presque) rien de renouvelable !

 

2.     Les pompes à chaleur… pas renouvelable non plus !

 

Pompe a chaleur air air reversible pour restaurant scolaire de 10 KWLes pompes à chaleur ne sont pas non plus à classer dans les énergies renouvelables. D’ailleurs, elles ne créent pas d’énergie, elles la transfèrent! Vous n’avez jamais vu votre frigo comme étant une énergie renouvelable, ni la climatisation de votre voiture, pourtant, ce sont des pompes à chaleur.

 

Une pompe à chaleur n’est pas une énergie du tout ! Donc, elle n’est renouvelable que si c’est une énergie renouvelable qui l’alimente !

 

3. Les surgénérateurs nucléaires : presque renouvelables !?

 

Avez-vous entendu parler du nucléaire de génération 4 ? Ou bien de surgénérateur ? Peut être pas. De Super Phénix, certainement.

 

Pourquoi cette appellation de Super Phénix ? Le phénix est un oiseau qui renaît de ses cendres. Pour les surgénérateurs nucléaires, ce nom est parfaitement adapté. Alors sont-ils renouvelables ? Phenix

Les théories scientifiques sur le nucléaire étant particulièrement complexes, je vais essayer de simplifier un peu les choses.

 

3.1. Un réacteur nucléaire d’aujourd’hui

 

Centrale nucléaire Cruas-3

Aujourd’hui, dans les centrales nucléaires, le combustible utilisé est l’uranium 235 (noté U235). Dans la nature, on trouve de l’Uranium sous la forme suivante : 0,7% d’U235, et le reste en U238.

 

Bref, seul 0,7% de l’Uranium est actuellement utilisable dans les centrales. En plus, pour qu’il soit facilement employable dans une centrale, il faut plus de 0,7%, sinon, la centrale va « s’éteindre » toute seule. On pratique donc « l’enrichissement », pour monter le taux d’U235 vers 3%.

 

Si on fait le bilan pour avoir une tonne d’uranium enrichi :

  • Il a fallu extraire plus de 4 tonnes d’uranium naturel. Il reste donc 3 tonnes de déchets d’uranium appauvri.
  • Pour avoir ces 4 tonnes d’uranium naturel, il a fallu broyer 1 333 333 tonnes de roches !

En résumé, pour 30 kg de combustible, on a broyé plus d’un million de tonnes de roches. Pas très intéressant tout ça.

Mais les scientifiques ont des idées pour pallier à ces inconvénients.

 

3.2. Le surgénérateur nucléaire

 

Photo_superphenixQuand on met du combustible dans une centrale nucléaire classique (3% de U235 et 97% de U238), il se passe un phénomène intéressant : une partie de U238 devient du Plutonium !

 

Le plutonium, on le connait bien pour faire des bombes atomiques, mais on ne sait pas bien s’en servir quand on fait des centrales nucléaires.

 

La « panacée » en terme de nucléaire, c’est de réussir à faire des réacteurs au plutonium appelés RNR (pour réacteurs à neutrons rapides).

 

Comment fait-on ?

  • Une centrale normale « brûle » de l’U235 et fait du plutonium (enfin, en partie).
  • Une centrale RNR, brûle ensuite ce plutonium mélangé à de l’U238 (4% de Plutonium, 96% de U238). Et le « miracle » se produit : au fur et à mesure qu’on consomme du plutonium, le U238 se transforme en… Plutonium qui, à son tour, peut être utilisé.

D’où le nom de Phénix, car les déchets deviennent le combustible !

 

3.3. Peut-on alors parler de nucléaire renouvelable ?

 

Et oui, si au fur et à mesure qu’on brûle du combustible, on en récupère du nouveau, c’est renouvelable.

 

Mais le surgénérateur nucléaire n’est pas une énergie renouvelable ! Simplement, on peut utiliser 100 % (ou presque de l’Uranium) au lieu de 0,7%. Bref, on est « juste » 150 fois plus efficace.

Cependant…

  • On n’arrive pas aujourd’hui à rendre le processus stable et sûr. D’ailleurs, on n’y parviendra certainement pas avant encore 20 ou 30 ans.
  • Les enjeux de sécurité nucléaires restent présents.
  • Il faut toujours broyer 1 million de tonnes de roches pour avoir une tonne de combustible.
  • Le plutonium est une denrée très recherchée par des gens… peu recommandables qui voudraient s’en service à des fins terroristes !

 

4.     Le pétrole : renouvelable … à (très) long terme

 

Le titre de ce paragraphe est une boutade, mais ce n’est pas totalement faux : les organismes vivants se décomposent à leur mort et deviennent petit à petit du pétrole (et également du gaz et du charbon).

raffinerie-port-jerome

Mais… Il a fallu des millions d’années pour que ce pétrole se « fabrique » !

 

Une bonne image est la suivante : imaginons que nous empilions des feuilles de papier jusqu’à atteindre la hauteur de la tour Eiffel. Si ces 320 mètres de papier représentent les trois et quelques milliards d’années de l’histoire de la vie, alors :

  • Chaque feuille de papier d’une épaisseur 0,1 mm représente 1000 ans !
  • Le pétrole s’est formé sur 100 mètres d’épaisseur.
  • Nous en avons brûlé un tiers sur 100 ans, c’est-à-dire sur un dixième de l’épaisseur de la dernière feuille !

 

Le pétrole et ses copains le charbon et le gaz, ne sont donc PAS des énergies renouvelables.

Conclusion

 

Pour le pétrole ou le nucléaire, il n’y a pas de confusion dans les esprits. Mais si un commercial vient vous dire qu’une pompe à chaleur est une énergie renouvelable, je vous conseille de vous méfier sérieusement, car c’est soit un menteur, soit un incompétent. Dans les deux cas, ne passez pas de contrat avec ce monsieur !

(10 commentaires)

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  1. Hervé Renault

    Merci pour cet article. Le point le plus intéressant, à mon avis, concerne l’uranium : On entend dire trop souvent dans les médias que le nucléaire ne consomme pas de pétrole, mais il consomme cet uranium qu’on ne trouve pas facilement, comme tu le rappelles.

    J’ai envie de dire, pour reprendre une expression similaire, que « l’énergie la plus renouvelable est celle qu’on ne consomme pas ! » ce qui devrait nous engager plus sur la piste des économies que la recherche de nouvelles énergies…

    1. admin

      Le nucléaire est un cas à part dans le mix énergétique.
      Ses avantages sont certains :
      – Capacité de production inégalée.
      – pas d’émission de CO2.

      A ce titre, il n’est pas idiot de penser que c’est une solution intermédiaire pour sortir du pétrole et surtout du charbon.

      Mais il y a les inconvénients :
      – Technologie difficile à maîtriser
      – On ne sais pas ce qu’on va faire des centrales et des déchets après leur fermeture.
      – Risque d’accident ? non quantifiable !

      Du coup, chaque fois qu’un kWh n’est pas consommé, cela facilite le problème ! En effet, dans l’état actuel des choses, si on en reste sur notre mode de consommation, la production devra suivre soit avec des centrales nucléaires, soit avec du charbon. Le kWh évité n’est ni nucléaire ni fossile. C’est le seul qui est propre.

  2. PH

    C’est de la désinformation pure :

    -le surgénérateur est bien renouvelable car il demande tellement peu d’uranium qu’on peut l’extraire de l’eau de mer. Cela a même était écrit en 1983, alors qu’on avait pas encore des résines performantes.

    -On sait quoi faire de l’aval du cycle nucléaire à différentes échelle de temps.

    -Même dans le nucléaire ordinaire on broie moins de roches pour faire un kWh que dans l’éolien.

    -Avec des surgénérateurs Fukushima n’aurait pas eu lieu.

    1. admin

      De la désinformation ?

      Mon cher PH, renouvelable, ça veut dire qu’il y a un flux d’énergie qui fait que se qu’on consomme est remplacé par ce flux nouveau qui arrive.

      Pour le soleil ou le vent, le flux est instantané et on est pas près ni techniquement ni en termes de besoin de consommer plus que ce qui arrive.

      Pour le bois, c’est un peu plus long, car il faut attendre plusieurs années pour que le flux remplace ce qui a été brulé.

      Pour le pétrole, c’est encore plus long.

      Mais alors pour l’uranium, il va falloir que vous m’expliquiez qu’est ce qui remplace l’uranium consommé ! En effet, je suis parfaitement d’accord sur le fait qu’un réacteur nucléaire consomme peu de combustible (en volume) /kWh. Je ne nie pas non plus que le surgénérateur divise ce volume (déjà faible) par 25. Mais le flux de création d’uranium ne nous est pas accessible. A moins qu’on ne trouve des solution pour aller le chercher dans les débris de super novæ !

      Donc, que cela consomme peut de combustible oui. Que cela soit renouvelable NON !

  3. PH

    Je regrette après 10 000 ans, les surgénérateurs ont des perspectives de plus d’un milliard d’années en prélevant une faible partie de l’uranium que transporte les fleuves, comme les éoliennes prélèvent une faible partie de l’énergie cinétique du vent. Pour a

  4. PH

    Pardon, pour aller chercher l’uranium on plonge une résine de polyéthylène greffée de ligands amidoxime pendant 40 jours dans un courant marin. Avec les réacteurs actuels, ça fait pas mal de surface ; mais avec les surgénérateurs, il suffit de 6 champs de 15 km sur 70 km pour alimenter l’humanité.

    http://www.energie-crise.fr/spip.php?article23
    http://www.energie-crise.fr/spip.php?article60

    Cordialement

    1. admin

      Et c’est pour quand ?

      1. PH

        Physiquement, c’est déjà possible ; économiquement ça démarrera lorsque le prix de l’uranium dépassera durablement 500 $ la livre, c’est à dire au plus tôt en 2050.

        A cette date là, tout dépend du parc de surgénérateurs et de leur coefficient de surgénération. Si on a déployé suffisamment de surgénérateurs, l’uranium de l’eau de mer ne sera pas exploité.

        Il se peut aussi que dans un éclair de lucidité pour sauver le climat : on se mette à construire dans les pays industrialisés des surgénérateurs en lieu et place des centrales à charbon (, dans ce cas aussi l’uranium de l’eau de mer intervient vers 2050.

        Ensuite, on s’arrête vers 2100, puis l’humanité peut se reposer 5000 à 10 000 ans sur l’uranium appauvri déjà extrait…

        1. admin

          J’ai un petit problème par rapport au surgénérateur. J’ai eu la vague impression qu’on avait du mal à les faire fonctionner dans de bonne condition (notamment de sécurité). Car mettre des fluides caloporteurs du type sodium, cela semble assez complexe. Alors à quand le surgénérateur de série avec des niveaux de qualité suffisant. Et surtout : que fait-on en attendant ? Enfin, est-il possible d’équiper n’importe quel pays de surgénérateur ?

  5. PH

    Non mettre du sodium n’est pas très complexe, évidemment lorsqu’on fait fonctionner un prototype pendant le contre choc pétrolier et que le pouvoir politique vous interdit de redémarrer pendant 4 ans après une réparation de 2 heures ( et quelques semaines de recherches il est vrai), ça semble compliqué.

    Superphénix c’était 96% de disponibilité sa dernière année. Le BN 600, un autre prototype, c’est 75% de facteur de charge sur 30 ans….

    Un surgénérateur se pilote plus facilement qu’un réacteur à eau pressurisée, on peut l’arrêter et le faire redémarrer assez facilement parce qu’il n’y a plus d’effet Xénon. Et lorsqu’on l’arrête, on n’est pas obligé d’injecter 35 litres d’eau par seconde, car l’inertie thermique du sodium est telle qu’il peut rester plus heures sans évacuation de la chaleur et la chaleur peut s’évacuer par convection naturelle vers des échangeurs sodium-air.

    On peut équiper tous les pays industrialisés de surgénéateurs, aujourd’hui, la Chine et l’Inde ont leurs petits surgénérateurs.

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